La question se pose régulièrement en matière d’indemnité de fin d’emploi : qu’est-ce qui est imposable et qu’est-ce qui ne l’est pas? Le présent texte se veut une réponse à cette question afin d’éviter, autant que faire se peut, la mauvaise surprise d’un avis de cotisation des autorités fiscales et de nouvelles discussions et/ou mésententes sur qui assumera cette nouvelle charge.
Le principe de base
Nous ne surprendrons personne en mentionnant que le principe de base en matière d’impôt est que tout revenu provenant d’une charge ou d’un emploi est imposable[1]. Selon les lois fiscales canadienne et québécoise, le traitement, le salaire ou toute autre rémunération, y compris les gratifications, sont imposables et sujets aux déductions à la source.
Comme toute règle a ses exceptions, surtout en matière d’impôts, il est possible dans des cas très limités que les sommes versées ne soient pas imposables.
Comme nous le savons tous, le Québec est entré dans la pandémie mondiale de la Covid-19 au printemps dernier. Le 13 mars 2020, le gouvernement du Québec décrétait l’urgence sanitaire qui , pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois, a paralysé le Québec et mis à rude épreuve l’économie des entreprises.
Le gouvernement du Québec et le gouvernement du Canada ont mis en place une série de mesures fiscales et financières visant à venir en aide aux travailleurs et aux entreprises : report de paiement de la TPS-TVQ, report de production des déclarations d’impôt ainsi que de multiples autres mesures. Ces mesures permettent essentiellement aux contribuables d’éviter de se faire imposer des intérêts et des pénalités en cas de retard dans le paiement de la TPS et la TVQ ou lors de la production des déclarations d’impôts.
Au Québec, annuellement, l’Agence du revenu du Québec (« L’Agence ») émet plus de 1 100 000 avis de nouvelle cotisation. De ce nombre, seulement 5 à 6 % sont émis à la suite d’une vérification fiscale. À cela s’ajoute également les actions de l’Agence du revenu du Canada. Malgré ce petit nombre, la complexité et les impacts possibles de ce type de dossiers m’incitent à conseiller fortement aux entrepreneurs québécois de ne pas hésiter à consulter rapidement leurs professionnels du domaine de la fiscalité afin que ces derniers s’assurent du respect de leurs droits. Le rôle du professionnel qui accompagne son client tout au long du processus de vérification et de la contestation de l’avis de cotisation à être éventuellement émis est crucial.
La
Loi sur
l’administration fiscale, loi qui gouverne les obligations des
contribuables québécois et les pouvoirs de l’Agence, établit que celle-ci peut
procéder à une vérification fiscale et le contribuable visé doit prêter
assistance à l’employé désigné[1]. Le rôle du professionnel,
dans l’accompagnement de son client, est de s’assurer du respect des droits de
celui-ci dans ce processus.
Le
plus grand des impairs que commettent certains professionnels est d’établir un
lien de confrontation dès le départ avec le vérificateur plutôt qu’un lien de
collaboration. Il importe de savoir qu’avec ou sans la collaboration du
professionnel et celle de son client, l’Agence procédera à sa vérification
fiscale et éventuellement, à l’émission d’avis de cotisation. Fort de mon
expérience de plus de 14 ans au sein du contentieux de l’Agence et maintenant 2
ans à la défense des intérêts des contribuables, mon constat est que le plus
grand perdant, lorsque cette attitude est adoptée, est le contribuable
lui-même. Cependant, « collaboration » ne veut pas dire tout donner,
sans limite ni discussion.
Le
premier rôle du professionnel consiste notamment à déterminer avec le
vérificateur désigné l’objet de la vérification, la période initialement visée
et la durée estimée de la vérification. Revenu
Québec écrit d’ailleurs ceci au sujet des droits et obligations d’un
contribuable qui fait l’objet d’une vérification fiscale :
« Vous
avez droit à des renseignements exacts, complets, compréhensibles
et accessibles. Nous (Revenu Québec) agissons avec transparence
et vous informons des étapes que nous suivons lorsque nous travaillons
avec vous. Nous sommes en mesure de vous fournir une explication claire
en ce qui concerne chacune
de nos demandes et de nos décisions. »[2]
C’est ainsi que l’Agence doit expliquer
les demandes formulées d’information et de documents. Il n’y a pas place à une
« partie de pêche » non plus qu’il n’y a place à une « guerre de
tranchées ». Le professionnalisme doit prendre le dessus sur les émotions
créées par l’intrusion désagréable d’une vérification fiscale. d’un côté comme
de l’autre.
Lorsque le vérificateur complète son
travail de vérification et conclut qu’un avis de cotisation sera émis, il
devrait soumettre, au préalable, un projet de cotisation. C’est à ce moment
qu’il doit présenter et expliquer les modifications qu’il entend apporter, tout
en donnant les justifications nécessaires. Il faut alors écouter, prendre des
notes et rester calme. Ce n’est pas le moment de tirer sur le messager. Au
contraire, le professionnel aura droit à un délai afin de présenter sa position
et d’établir le bien-fondé ou non des points litigieux avant qu’un nouvel avis
de cotisation ne soit émis.
Le rôle de négociateur prend alors
toute son importance. Son devoir est de s’assurer, le cas échéant, que son
client n’assume que ses réelles obligations fiscales en application des lois et
règlements. C’est le temps d’user de flair, de déterminer l’ouverture à la
discussion et de bien choisir ses batailles. À cet égard, ce n’est pas
seulement pour le bénéfice du client, mais également pour la crédibilité du
professionnel. Croyez-moi, les professionnels ont beaucoup plus à perdre en
agissant de manière belliqueuse que de manière harmonieuse.
Si, malgré toute la qualité de la
représentation et des arguments soulevés, l’Agence émet un avis de nouvelle
cotisation, le contribuable bénéficie d’un délai pour le contester suivant la
forme et les formulaires fiscaux prescrits. J’aborderai ce sujet au cours d’un
prochain texte.
Tout au long de ce processus de
vérification, il ne faut jamais hésiter à faire appel aux services d’avocats
spécialisés en litige fiscal. Malgré que ce ne soit pas la majorité des
dossiers de vérification qui seront contestés auprès de la direction des
oppositions, encore moins devant les tribunaux compétents, il n’en demeure pas
moins qu’une stratégie globale constitue souvent la meilleure arme. La
juxtaposition des connaissances comptables, fiscales et légales constitue
certainement un des meilleurs atouts à une argumentation post-projet de cotisation.
De plus, les
informations discutées en cours de mandat se trouvent protégées par le secret
professionnel conféré à la relation client-avocat[3]. Cette protection n’est
pas sans importance.
Mes années passées à défendre les
intérêts de l’Agence devant les différentes instances judiciaires me donnent
une connaissance précise sur l’organisation, son fonctionnement et les manières
d’agir et de faire. N’hésitez pas à prendre contact avec moi dès le début du
processus de vérification. L’expérience et l’expertise acquises au fil du temps
dans ce genre de mandat aideront nécessairement les contribuables dans la
défense de leurs intérêts.
[1] Article 38, Loi sur l’administration fiscale, RLRQ, c. A-6.002. Voir aussi
l’arrêt de principe sur le sujet R.c. McKinlay Transport ltd [1990] 1 R.C.S.
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[2] Document : Vos droits et vos obligations à l’égard d’une vérification fiscale,
page 2 (site internet de Revenu Québec).
[3]
L’article 46 de la Loi sur
l’administration fiscalelimite
la protection du secret professionnel aux avocats et notaires, excluant
implicitement les comptables.